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Cour de cassation : les arrêts marquants du fonds de concours du lundi 16 juillet

Social - IRP et relations collectives, Contrôle et contentieux, Contrat de travail et relations individuelles, Santé, sécurité et temps de travail
16/07/2018
Une décision à retenir plus particulièrement cette semaine. Celle déclarant les CDI intérimaires fondés sur l’accord de branche de 2013 illégaux. La justification : les organisations patronales et syndicales ont été au-delà de la loi en créant un nouveau type de contrat. En d’autres termes, le CDI intérimaire doit résulter d’une loi et non d’un accord de branche.
Pour mémoire, conclu entre le salarié et l'entreprise de travail temporaire, le CDI intérimaire permettait la réalisation de missions successives en garantissant une rémunération encadrée, une prise en charge des périodes non travaillées, l'ouverture des droits aux congés payés…

Illégalité des CDI intérimaires fondés sur l'accord de branche de 2013

Il est loisible au législateur, après avoir défini les droits et obligations touchant aux conditions et aux relations de travail, de laisser aux employeurs et aux salariés, ou à leurs organisations représentatives, le soin de préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte.
Pour dire que les organisations en cause avaient compétence pour négocier l'ensemble des éléments constitutifs de l'accord collectif de branche conclu le 10 juillet 2013, le jugement retient que le champ normatif de l'accord n'excède pas en soi la limite fixée à l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 concernant notamment les principes fondamentaux du droit du travail relevant de la compétence d'attribution réservée au législateur, que les modalités particulières du contrat à durée indéterminée intérimaire ne font, en définitive, que décliner des obligations civiles préexistantes, qui par définition peuvent donc ne pas être strictement identiques à celles d'un contrat à durée indéterminée de droit commun ou des contrats de missions temporaires jusqu'ici pratiqués et qui relèvent d'un champ conventionnel bénéficiant d'une certaine liberté en complément ou en supplément de la loi, ce d'autant que la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 a prévu, dans son article 56, des conditions d'expérimentation de ce même régime de contrat de travail à durée indéterminée intérimaire.
En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, laquelle ne dispose que pour l'avenir, et alors que l'accord collectif du 10 juillet 2013, en instaurant le contrat à durée indéterminée intérimaire permettant aux entreprises de travail temporaire d'engager, pour une durée indéterminée, certains travailleurs intérimaires, crée une catégorie nouvelle de contrat de travail, dérogeant aux règles d'ordre public absolu qui régissent, d'une part, le contrat de travail à durée indéterminée, d'autre part le contrat de mission, et fixe, en conséquence, des règles qui relèvent de la loi, le tribunal de grande instance a violé l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958.
Cass. soc., 12 juill. 2018, n° 16-26.844
 
Modification du contrat de travail
Le seul refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Par ailleurs, la rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique.
Cass. soc., 11 juill. 2018, n° 17-12.747
 
Prescription/Demande de régularisation des cotisations de retraite
L’obligation pour l’employeur d’affilier son personnel cadre à un régime de retraite complémentaire et de régler les cotisations qui en découlent est soumise à la prescription de droit commun.
Dès lors la cour d’appel, qui a constaté que la demande ne concernait pas des cotisations afférentes à des salaires non versés mais portait sur la contestation de l’assiette des cotisations retenue par l’employeur sur les salaires versés, aurait dû déduire que cette demande était, pour la période antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, soumise à la prescription trentenaire, et que la créance dépendant d’éléments qui ne sont pas connus du créancier et qui résultent de déclarations que le débiteur est tenu de faire, la prescription ne courait qu’à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite.
Cass. soc., 11 juill. 2018, n° 16-20.029
 
QPC expertise médicale/Non-lieu à renvoi
La question transmise est ainsi rédigée : « L'article L. 4624-7 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, par application duquel l'employeur ou le salarié peuvent contester les avis ou préconisations du médecin du travail en sollicitant devant la formation de référé du Conseil de prud'hommes la désignation d'un expert dont le rapport sera rendu sur la base d'éléments médicaux et d'examens médicaux non communiqués à l'employeur, porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et, plus précisément, aux droits de la défense et au principe du contradictoire ? ».
La question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce sens que lors d'une expertise médicale, les parties ont la faculté de mandater un médecin qui, au cours des opérations d'expertise, pourra prendre connaissance des documents comportant les renseignements d'ordre médical examinés par l'expert, et peuvent dès lors faire valoir leurs droits dans le cadre d'un débat contradictoire devant la juridiction contentieuse.
Cass. soc., 11 juill. 2018, QPC, n° 18-40.020
 
QPC participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail et à la gestion des entreprises/Non-lieu à renvoi
La question transmise est ainsi rédigée : « L'application combinée des dispositions des articles L. 2323-3, L. 2323-4 et L. 4612-8 du Code du travail est-elle conforme au principe général du droit d'égalité entre les justiciables, et aux principes fondamentaux des droits de la défense et de liberté pour tout travailleur de participer à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises tels que définis protégés et garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen ainsi que par l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ? ».
La question posée, en tant qu’elle porte sur l’article L. 4612-8 du Code du travail, ne présente pas un caractère sérieux en ce que les dispositions contestées prévoient des délais assortis des garanties nécessaires pour assurer le respect du principe de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises et que les règles encadrant l'appel répondent aux exigences découlant des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 dès lors qu'en application de l'article R. 2323-1 du Code du travail, le délai de consultation du comité d'entreprise ne court qu'à compter de la communication ou de la mise à disposition des documents prévus par la loi ou par un accord collectif et que la cour d'appel, dans le cadre de sa compétence, est tenue de vérifier la conformité, à la date où il a statué, de la décision du juge de première instance aux dispositions des articles L. 2323-3, L. 2323-4 et L. 4612-8 du Code du travail et, le cas échéant, d'exercer les pouvoirs qu'elle tient du dernier alinéa de l'article L. 2323-4 du Code du travail, les justiciables étant placés à cet égard dans des situations identiques au regard des garanties qu'offre l'exercice de la voie de recours.
Cass. soc., 12 juill. 2018, QPC, n° 18-40.024
 
 
 
Source : Actualités du droit