<< Retour aux articles
Image

Accord politique européen sur le règlement plateformes en ligne

Tech&droit - Start-up, Données
14/02/2019
Le 13 février, le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne sont parvenus à un accord politique sur les toutes premières règles visant à créer un environnement commercial équitable, transparent et prévisible pour les entreprises et les commerçants qui utilisent des plateformes en ligne.
« Il s'agit des premières règles de ce type dans le monde, a tenu à préciser Mariya Gabriel, commissaire chargée de l'économie numérique et de la société, et elles trouvent le juste équilibre entre la stimulation de l'innovation et la protection de nos valeurs européennes ».
 
L’objectif de ce nouveau règlement : créer un environnement commercial en ligne plus prévisible et plus transparent et offrir de nouvelles possibilités de règlement des litiges et des plaintes (sur les plateformes de règlement en ligne des conflits, v., en France, le projet de loi de programmation 2018-2022 pour la justice, TA Sénat, n° 61, 2018-2019 ; sur ce sujet, v. PJL justice : adoption par le Sénat d’un texte substantiellement modifié, Actualités du droit, 13 févr. 2019).
 
Pour Andrus Ansip, vice-président chargé du marché unique numérique, « L'accord d'aujourd'hui marque une étape importante du marché unique numérique qui profitera à des millions d'entreprises européennes qui comptent sur les plateformes numériques pour atteindre leurs clients. Notre objectif est d'interdire certaines des pratiques les plus déloyales et de créer une référence en matière de transparence, tout en préservant les grands avantages des plateformes en ligne, tant pour les consommateurs que pour les entreprises ».
 
Les plateformes concernées
Quelles entreprises sont visées ? Ces nouvelles règles s'appliqueront à l'ensemble de l'économie des plateformes en ligne (environ 7 000 plates-formes ou places de marché en ligne opérant dans l'UE) qui fournissent leurs services aux entreprises établies dans l'UE et qui offrent des biens ou des services aux consommateurs établis dans l'UE. Il s’agit en fait des commerçants qui vendent en ligne via les places de marché, des hôtels utilisant des plateformes de réservation ou des développeurs d'applications. Certaines dispositions s'appliqueront également aux moteurs de recherche, notamment celles concernant la transparence du classement.
 
Comme le souligne le commissaire chargé du marché intérieur, de l'industrie, de l'esprit d'entreprise et des PME, Elżbieta Bieńkowska Bieńkowska, « Beaucoup d'entre eux n'ont pas la force de négociation nécessaire pour entrer en conflit avec une grande plate-forme, mais avec ces nouvelles règles, ils disposent d'un nouveau filet de sécurité et ne craignent plus d'être expulsés au hasard d'une plate-forme ou d'être mal classés dans les résultats de recherche ».
 
Sont, en revanche, exclus par le règlement les services suivants :
  • publicité en ligne ;
  • services de paiement ;
  • optimisation pour les moteurs de recherche ;
  • services qui relient le matériel et les applications qui n'interviennent pas dans les transactions directes entre entreprises et consommateurs ;
  • intermédiaires qui opèrent uniquement entre entreprises (par exemple, les échanges publicitaires en ligne) ;
  • détaillants en ligne, tels que les épiceries (supermarchés) et les détaillants de marques, dans la mesure où ces détaillants en ligne ne vendent directement que leurs propres produits, sans faire appel à des tiers vendeurs et ne sont pas impliqués dans la facilitation des transactions directes entre ces tiers vendeurs et consommateurs.  
Le point en quelques chiffres
- près de la moitié (42 %) des petites et moyennes entreprises de l'UE ont déclaré utiliser les marchés en ligne pour vendre leurs produits et services ;
- près de 50 % des entreprises européennes opérant sur des plates-formes rencontrent des problèmes ;
environ 38 % des problèmes concernant les relations contractuelles restent non résolus
- 26 % sont résolus mais avec des difficultés ;
environ 1,27 à 2,35 milliards d'euros sont ainsi directement perdus dans les ventes.
Enquête Eurobaromètre et analyse d’impact de la Commission européenne 

Le point sur le contenu de ce règlement
Voici ce que prévoit ce texte :
  • interdiction de certaines pratiques déloyales : avec les nouvelles règles, les plates-formes numériques ne peuvent plus suspendre ou résilier le compte d'un vendeur sans raison claire et sans possibilité d'appel. La plate-forme devra également réintégrer les vendeurs si une suspension a été faite par erreur ;
  • des termes simples et intelligibles et un préavis pour les changements : les conditions générales doivent être facilement accessibles et présentées dans un langage clair et compréhensible. En cas de modification des présentes conditions générales, un préavis d'au moins 15 jours doit être donné pour permettre aux entreprises d'adapter leurs activités à ces changements. Des délais de préavis plus longs s'appliquent si les modifications nécessitent des adaptations complexes ;
  • une plus grande transparence : les places de marché et les moteurs de recherche doivent divulguer les principaux paramètres qu'ils utilisent pour classer les biens et services sur leur site, afin d'aider les vendeurs à comprendre comment optimiser leur présence ;
  • divulgation obligatoire pour toute une gamme de pratiques commerciales : les plateformes doivent divulguer de manière exhaustive tout avantage qu'elles pourraient donner à leurs propres produits par rapport aux autres. Elles doivent également divulguer les données qu'elles collectent et la manière dont ils les utilisent - et en particulier la manière dont ces données sont partagées avec d'autres partenaires commerciaux dont ils disposent
  • amélioration du règlement des différends : toutes les plateformes doivent mettre en place un système interne de traitement des plaintes pour aider les utilisateurs professionnels, à l’exception des plateformes les plus petites en termes d'effectifs ou de chiffre d'affaires ; et elles sont tenues de rendre compte au grand public de leur fonctionnement (nombre de plaintes, objet, délai de traitement des plaintes et la décision prise, etc.). ;
  • médiation : les plateformes devront offrir aux entreprises davantage d'options pour résoudre un problème potentiel par l'entremise de médiateurs ;
  • association d'entreprises : les associations d'entreprises pourront poursuivre les plateformes devant les tribunaux pour faire cesser tout non-respect des règles.
 
Ce règlement doit désormais être formellement adopté par le Conseil de l’Union européenne. Les nouvelles règles s'appliqueront douze mois après leur publication au Journal officiel et feront l'objet d'un réexamen dans les dix-huit mois qui suivront. Un observatoire en ligne dédié aux plateformes a par ailleurs été mis en place un pour suivre l'évolution du marché et l'application effective des règles.
 
Source : Actualités du droit