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Loi PACTE : champ d’application élargi pour les procédures de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire simplifiée

Affaires - Commercial
23/05/2019
La volonté de "faciliter le rebond des entrepreneurs et des entreprises" est au cœur de la loi Pacte du 22 mai 2019 (section 3). Dans cet objectif, l’article 57 de la loi vise à augmenter les ouvertures de rétablissement professionnel ("anticiper plus en amont les difficultés et […] favoriser ainsi le rebond des entrepreneurs de bonne foi") et à faire de la liquidation judiciaire simplifiée "la norme pour les petites et moyennes entreprises de moins de cinq salariés", selon les termes de l’étude d’impact présentant en son temps le projet de loi. De quoi donner une "seconde chance" aux entrepreneurs ayant connu un échec…
Les dispositions relatives au rétablissement professionnel et à la liquidation judiciaire simplifiée contenues à l’article 57 de la loi du 22 mai 2019 – dont on soulignera qu’elles répondent parfaitement aux exigences de la proposition de directive "insolvabilité" du 22 novembre 2016 (se reporter à l’article 196 de la loi Pacte) – ne sont pas applicables aux procédures en cours au jour de la publication de la loi.
 
I. Rétablissement professionnel

Ni liquidative ni collective, la procédure de rétablissement professionnel, instituée par l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, est destinée à "favoriser le rebond des exploitants personnes physiques impécunieux en leur procurant un effacement de leurs dettes après une procédure sans liquidation, donc sans réalisation de leurs actifs au demeurant de faible valeur", ainsi que le soulignait l’étude d’impact du projet de loi. Cependant, cette procédure demeure peu connue des débiteurs et des professionnels.

Afin qu’elle puisse concerner un plus grand nombre de débiteurs, l’article 57 de la loi du 22 mai 2019 élargit le champ d’application de la procédure et, pour cela, systématise l’examen par le tribunal saisi d’une demande de liquidation judiciaire des conditions du rétablissement professionnel afin de lui permettre d’ouvrir cette procédure, avec l’accord du débiteur, sans toutefois la rendre obligatoire ; ainsi, l’examen des critères du rétablissement professionnel devient un préalable obligatoire pour le tribunal saisi d’une demande de résolution du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire, d’une demande de redressement émanant du débiteur ou d’une demande de liquidation émanant du débiteur, du ministère public ou d’un créancier.

Ces mesures, qui entraînent la modification des articles L. 626-27, L. 631-7, L. 631-20-1, L. 641-1, L. 645-1, L. 645-3 et L. 645-9 du code de commerce, n’affectent pas les autres procédures collectives (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires).

Les libellés des articles modifiés sont désormais les suivants :

— Article L. 626-27 (complété)
 
" I. En cas de défaut de paiement des dividendes par le débiteur, le commissaire à l'exécution du plan procède à leur recouvrement conformément aux dispositions arrêtées. Il y est seul habilité. Lorsque le commissaire à l'exécution du plan a cessé ses fonctions, tout intéressé peut demander au tribunal la désignation d'un mandataire ad hoc chargé de procéder à ce recouvrement.
 
Le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan. 
 
Lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de redressement judiciaire ou, si le redressement est manifestement impossible, une procédure de liquidation judiciaire. Avant de statuer, le tribunal examine si la situation du débiteur répond aux conditions posées aux articles L. 645-1 et L. 645-2 et ouvre, le cas échéant, avec son accord, une procédure de rétablissement professionnel.
 
Le jugement qui prononce la résolution du plan met fin aux opérations et à la procédure lorsque celle-ci est toujours en cours. Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 626-19, il fait recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.
 
II. […]
 
III. […]."
 
— Article L. 631-7 (complété)
 
" Les articles L. 621-1, L. 621-2 et L. 621-3 sont applicables à la procédure de redressement judiciaire.
 
Lorsque la situation du débiteur qui a déclaré être en état de cessation des paiements apparaît manifestement insusceptible de redressement, le tribunal invite celui-ci, en l'absence de demande subsidiaire aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, à présenter ses observations sur l'existence des conditions de l'article L. 640-1. Il statue ensuite, dans la même décision, sur la demande de redressement judiciaire et, le cas échéant, sur l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.
 
Avant de statuer, le tribunal examine si la situation du débiteur répond aux conditions posées aux articles L. 645-1 et L. 645-2 et ouvre, le cas échéant, avec son accord, une procédure de rétablissement professionnel."
 
— Article L. 631-20-1 (complété)
 
" Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa de l’article L. 626-27, lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de liquidation judiciaire. Avant de statuer, le tribunal examine si la situation du débiteur répond aux conditions posées aux articles L. 645-1 et L. 645-2 et ouvre, le cas échéant, avec son accord, une procédure de rétablissement professionnel."
 
— Article L. 641-1 (complété)
 
" I. Les dispositions des articles L. 621-1 et L. 621-2 ainsi que celles de l'article L. 622-6 relatives aux obligations incombant au débiteur sont applicables à la procédure de liquidation judiciaire.
 
Lorsque la situation du débiteur qui a déclaré être en état de cessation des paiements n'apparaît pas manifestement insusceptible de redressement, le tribunal invite celui-ci, en l'absence de demande subsidiaire aux fins d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, à présenter ses observations sur l'existence des conditions de l'article L. 631-1. Il statue ensuite, dans la même décision, sur la demande de liquidation judiciaire et, le cas échéant, sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
 
Avant de statuer, le tribunal examine si la situation du débiteur répond aux conditions posées aux articles L. 645-1 et L. 645-2 et ouvre, le cas échéant, avec son accord, une procédure de rétablissement professionnel.
 
II. […]
 
III. […]
 
IV. […]."
 
— Article L. 645-1 (modifié)
 
" Il est institué une procédure de rétablissement professionnel sans liquidation ouverte à tout débiteur, personne physique, mentionné au premier alinéa de l'article L. 640-2, en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible, n'a pas cessé son activité depuis plus d'un an, n'a employé aucun salarié au cours des six derniers mois et dont l'actif déclaré a une valeur inférieure à un montant fixé par décret en Conseil d'État.
 
La procédure ne peut être ouverte à l'égard d'un débiteur qui a affecté à l'activité professionnelle en difficulté un patrimoine séparé de son patrimoine personnel en application de l'article L. 526-6.
 
Elle ne peut être davantage ouverte en cas d'instance prud'homale en cours impliquant le débiteur."
 
— Article L. 645-3 (modifié)
 
" Le tribunal n'ouvre la procédure de rétablissement professionnel qu'après s'être assuré que les conditions légales en sont remplies.
 
L'avis du ministère public est requis préalablement à l'ouverture de la procédure."
 
— Article L. 645-9 (modifié)
 
" À tout moment de la procédure de rétablissement professionnel, le tribunal peut, sur rapport du juge commis, ouvrir la procédure de liquidation judiciaire sur laquelle il a été sursis à statuer s'il est établi que le débiteur n'est pas de bonne foi ou si l'instruction a fait apparaître l'existence d'éléments susceptibles de donner lieu aux sanctions prévues par le titre V du présent livre ou à l'application des dispositions des articles L. 632-1 à L. 632-3.
 
La procédure de liquidation judiciaire est également ouverte s'il apparaît que les conditions d'ouverture de la procédure de rétablissement professionnel n'étaient pas réunies à la date à laquelle le tribunal a statué sur son ouverture ou ne le sont plus depuis.

Le tribunal peut également être saisi en ouverture de la procédure de liquidation judiciaire sur requête du ministère public ou par assignation d'un créancier ou, dans le cas prévu au deuxième alinéa, par le débiteur."
 
II. Procédure de liquidation judiciaire simplifiée

Autre mesure permettant aux plus petits débiteurs de rebondir plus vite économiquement, la loi modifie la procédure de liquidation simplifiée, se caractérisant par sa durée plus courte et ses coûts réduits, afin d’en accroître le champ d’application : celle-ci devient obligatoire sur la base des seuils actuels de la procédure de liquidation judiciaire facultative, cette dernière disparaissant.

Ainsi, la procédure simplifiée est obligatoire pour tous les débiteurs qui :
— ne détiennent pas de bien immobilier ;
— et qui n’auront pas employé plus de cinq salariés au cours des six mois précédant l’ouverture de la procédure ;
et qui n’auront pas réalisé un chiffre d’affaires excédant 750 000 euros HT à la clôture du dernier exercice comptable.

Là encore, les autres procédures collectives ne sont pas affectées.

Ces mesures entraînent l’abrogation de l’article L. 641-2-1 (instaurant la liquidation judiciaire facultative) du code de commerce et la modification des articles L. 644-2 et L. 644-5 dudit code, dont les nouveaux libellés sont les suivants :

— Article L. 644-2 (modifié)
 
" Par dérogation aux dispositions de l'article L. 642-19, lorsque la procédure simplifiée est décidée en application de l'article L. 641-2, le liquidateur procède à la vente des biens mobiliers de gré à gré ou aux enchères publiques dans les quatre mois suivant la décision ordonnant la procédure simplifiée.
 
À l'issue de cette période, il est procédé à la vente aux enchères publiques des biens subsistants."
 
— Article L. 644-5 (modifié)
 
" Le tribunal prononce la clôture de la liquidation judiciaire au plus tard dans le délai de six mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l'application de la procédure simplifiée, le débiteur entendu ou dûment appelé. Ce délai est porté à un an lorsque le nombre des salariés du débiteur ainsi que son chiffre d’affaires hors taxes sont supérieurs à des seuils fixés par décret.
 
Le tribunal peut, par un jugement spécialement motivé, proroger la procédure pour une durée qui ne peut excéder trois mois."
 
Pour des compléments sur le rétablissement professionnel et la procédure de liquidation judiciaire simplifiée, se reporter respectivement aux nos 4454 et s. et 4496 et s. de l’édition 2019 du Lamy droit commercial.
Source : Actualités du droit