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Lutte contre la haine en ligne : le Sénat renforce les moyens d’action du CSA

Tech&droit - Données
27/02/2020
Plateforme versus CSA. Qui est l’acteur le plus pertinent pour tenter de réguler les propos haineux sur internet ? Le texte voté au Sénat le 26 février 2020, amputé d’une de ses dispositions phare, à savoir le retrait en 24h, renforce les pouvoirs du CSA. Retour sur les modifications apportées par cette nouvelle lecture.
Si la nécessité de réguler est partagée, députés et sénateurs s’opposent en revanche sur la méthode. Là où la Chambre haute met en avant la nécessité de prévoir des dispositions qui soient réellement opérationnelles, tout en étant respectueuses de la liberté d’expression, les députés entendent pour leur part mettre davantage de pression sur les plateformes et réseaux sociaux, principalement en leur enjoignant de retirer sous 24h tout contenu haineux.

« Privilégions la régulation par le CSA à celle effectuée par les géants américains du numérique. Le régulateur aura de solides pouvoirs de contrôle – communication des algorithmes – et de sanction –jusqu'à 4 % du chiffre d'affaires », a souligné le rapporteur du texte au Sénat, Christophe-André Frassa (Sénat, compte rendu des débats, 26 févr. 2020). Mais pour le secrétaire d’État au numérique, Cédric O,  « Ce texte ne s'en remet pas à la seule régulation des réseaux sociaux pour faire appliquer la loi. Le parquet sera spécialisé, et il y aura un dispositif de dépôt de plaintes en ligne ».

La commission des lois du Sénat avait déjà bien modifié le texte, le 5 février 2020 (TA Sénat n° 300, 20189-2020). Rappelons que les sénateurs avaient alors :
  • renforcé les obligations de moyen mises à la charge des réseaux sociaux et sanctionnées par le régulateur français pour permettre au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de s’assurer que les plateformes rendent des comptes à leurs utilisateurs et investissent suffisamment pour pouvoir supprimer rapidement les contenus qui leurs sont signalés ; le tout avec des pouvoirs de contrôle plus étendus (communication des algorithmes) et un pouvoir de sanction renforcé (amende administrative allant jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires annuel) ;
  • écarté la création d’un nouveau délit de "non-retrait" : jugé « juridiquement fragile, il aurait immanquablement incité les plateformes à censurer par prudence des contenus pourtant licites, et aurait délégué aux géants américains du numérique la police de la liberté d’expression », souligne la commission des lois ;
  • ajouté plusieurs mesures qui ambitionnent de s’attaquer à la viralité des discours de haine, à leur financement par la publicité et aux faux comptes sur les réseaux sociaux (les « fermes à trolls »), et de promouvoir l’interopérabilité entre plateformes afin de permettre un passage plus fluide de l’une à l’autre.
 
Que faut-il maintenant retenir du passage en séance publique ? Huit amendements seulement avaient été déposés et un seul a été adopté (TA Sénat n° 300, 2019-2020, amendement n° 5 rect.), contre l’avis du gouvernement.
 
Son objectif : donner au CSA un pouvoir de recommandation en matière d’interopérabilité entre plateformes. Concrètement, ce régulateur pourra mettre en place des outils de coopération et de partage d’informations entre opérateurs.
 
Ce texte doit maintenant être examiné en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale. Reste à savoir quand, eu égard au temps consacré aux débats sur le projet de loi instaurant un système universel de retraite
Source : Actualités du droit